Chiche ! Chambéry (73)

Des cantines bio ! Quelles cantines bio à Chambéry ?

jeudi 26 février 2009

Nous reproduisons ci-dessous une chronique de l’association Locobio qui avait organisé le 31 mars 2008 un colloque à Chambéry, sur le thème "Développer une économie locale propre en Rhône-Alpes : Rêve ou réalités ?", en présence notamment de Daniel Vuillon, le fondateur des Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP) en France.

Des cantines bio ! Quelles cantines bio à Chambéry ?

Je veux parler de la valeur ajoutée des produits biologiques pour la santé. Or, que je sache et en-dehors de leur sensibilité personnelle au sujet, les élus locaux ont une responsabilité en matière de santé publique. Je veux aussi parler des municipalités, pas seulement de gauche et verte, qui sont de plus en plus nombreuses à changer de politique en la matière. Je veux enfin parler de l’enjeu : il s’agit bien de nos propres enfants qui n’ont pas demandé à naître et que nous devons accueillir en donnant l’exemple. Un peu plate et moralisatrice cette dernière réflexion, mais elle a le mérite de revenir aux fondamentaux : la différence entre des enfants et des adultes, c’est que les seconds peuvent tout de même plus agir et fondent même occasionnellement leur supériorité sur l’âge. Dont acte.

Le problème des cantines bio à Chambéry, c’est d’abord la volonté politique. On en revient toujours là. Dommage car l’équipe actuelle est en début de mandat. Le temps supposé de l’action. Les arguments que j’ai pu recueillir ça et là contre le projet que je défends (et je suis de moins en moins la seule) ne tiennent pas. Ainsi, l’introduction du bio serait problématique pour d’éternelles questions d’hygiène. Où l’on nous ressert les réglementations européennes, comme un vieux leitmotiv pour cacher l’inertie. A croire que beaucoup de mairies sont donc dans l’illégalité ; à moins qu’elles aient trouvé des solutions pour limiter ces obstacles juridiques. Elles pourraient sans doute nous inspirer. Côté rentabilité, cette évolution ne serait pas non plus souhaitable : le personnel des cantines ne peut tout de même pas « perdre du temps à découper des meules » (si, si, j’ai entendu cet argument) ! Qu’à cela ne tienne : que la collectivité s’engage auprès de producteurs individuels ou de coopératives et des emplois seront créés pour la fournir en portions individuelles. Ce serait tout de même mieux que faire manger aux élèves du fromage à la croûte en plastique… emballé dans du plastique et venant sans doute de bien loin alors que nous vivons dans un pays qui se targue d’être laitier. Non seulement la collectivité locale, incarnation de l’intérêt général, donnerait l’exemple à d’autres acteurs plus sceptiques, mais en plus elle participerait activement à la conversion écologique d’une économie de proximité.

Il est urgent que les responsables élus s’approprient le projet des cantines bio. En effet, le chemin sera long avant de le réaliser car de réelles difficultés existent. Il faudra d’abord beaucoup de pédagogie pour convaincre les parents d’élèves qui demeurent rétifs. Quand je parle de pédagogie, je ne parle pas de propagande en faveur d’un projet qui n’en vaudrait pas la peine. Non, je parle d’information car la peur légitime de certaines familles est le prix plus élevé supposément engendré par le bio. Et là, il faut expliquer ce que c’est, que manger bio c’est effectivement ne pas avoir besoin de viande à tous les repas, que c’est tout un équilibre alimentaire à revoir. Un équilibre alimentaire qui n’a pour finir pas d’incidence sur leur budget. Comme le dit un livre de référence sur le sujet « Manger bio, c’est pas du luxe ». J’ajouterais que si léger surcoût il y a, que l’on ne nous dise plus qu’il n’y a plus d’argent, que « c’est la crise », etc… N’attendons pas d’être à notre tour dans des maisons de retraite et que les enfants d’aujourd’hui, devenus des adultes aux commandes, nous servent de la nourriture médiocre en nous balançant qu’en notre temps nous avons fait pareil. Les idées et les actions, c’est à nous, ici et maintenant de les avoir.

Autre verrou également lié à de la méconnaissance et à de la routine : la résistance du personnel dans les cuisines. Et elle ne serait pas anormale. Car se voir, comme on l’a déjà vu et pas au sein de la municipalité chambérienne mais pas bien loin, intimer du jour au lendemain de préparer des milliers de repas bio, ce n’est pas du bon travail. Il ne faut pas confondre cantine bio et promotion politique, enfin carrément démagogie. Passer en clair du rien à des pallettes d’un jour. Un tel projet implique au contraire des investissements à moyen et long termes, comme dans l’information et la formation des cuisiniers.

En parlant d’investissements plus qu’à courte vue, et voilà que se repose la question du foncier. Car un argument entendu, fort juste, est le manque d’offre bio –de surcroît locale- pour répondre à la nouvelle demande massive que serait celle ces collectivités publiques. En clair, on préfère rester la tête dans le sac, continuer à délivrer des permis de construire pour des lotissements et autres pavillons individuels avec parking, plutôt que prendre la vache tarine par les cornes. Et réserver des terres à vocation nourricière en bio pour l’avenir. Cela se fait bien au Québec, pourquoi cela ne serait-il pas possible ici ? C’est bien l’Amérique, non ? Et on ne serait plus fasciné par l’Amérique en ces temps ultra-libéraux… franchement, il y a quelque chose qui ne va pas alors. Avec des terres proches des foyers de population, il n’y aura plus -ou moins- de problème d’approvisionnement. Et à nouveau il y a un enjeu économique puisqu’il s’agit de créer des emplois de proximité dans des secteurs d’activité vitaux, convertis aux normes écologiques de demain. A noter, en passant, que le programme européen Rafael existe pour développer les circuits-courts afin de fournir les cantines et aider nos enfants à mieux manger. Preuve que l’Europe peut servir à autre chose qu’à argumenter contre les cantines bio.

Au terme de cette chronique un brin longue et excédée (mais le sujet le mérite), il semblerait très opportun que l’équipe municipale réunisse rapidement tous les acteurs concernés par la conversion bio de la restauration scolaire. Parents d’élèves, producteurs, élus, associations, personnel des écoles, fournisseurs, lycées agricoles et professionnels devraient se retrouver pour dresser l’état précis de la situation actuelle, définir les actions à mener, répartir les rôles et élaborer un calendrier. Il serait ainsi très intéressant de savoir quand aura lieu le prochain appel d’offres pour la délégation de service et si, dans le cadre de l’actuel cahier des charges, des marges de manœuvre existent pour avancer sur ce dossier… appétissant.

N’oublions pas : n’attendons pas que nos enfants nous accusent…

© Yolaine de LocoBio, Janvier 2009


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