Chiche ! Chambéry (73)

Capitalisme et développement durable

octobre 2007

Polluer moins pour polluer plus longtemps

Sylvie Brunel, auteure d’un « Que sais-je ? » sur le développement durable, avance (en le regrettant) que la notion de développement durable a été réduite à sa seule dimension écologique et que ce terme est aujourd’hui le fer de lance d’une recolonisation des pays du Sud (sic).

A l’opposé de cette approche, Serge Latouche et d’autres intellectuel-le-s de la décroissance, constatent au contraire que le développement durable, loin de faire avancer l’écologie, a permis au capitalisme de se renforcer en utilisant ce terme pour lisser son image. En témoigne l’existence d’un lobby nommé Business Action for Sustainable Development, rassemblant des dizaines de firmes transnationales, parmi les plus polluantes de la planète (Areva pour le nucléaire, Texaco pour le pétrole, Dupont pour la chimie, etc.) (8). C’est ainsi que selon Paul Ariès, le développement durable consiste à « polluer moins pour polluer plus longtemps ». Cette appropriation de la notion de développement durable par de grands pollueurs est d’autant plus facile que le « développement durable » a remis à l’honneur… le développement. Toujours à l’opposé de Sylvie Brunel, je me range du côté d’Hervé Kempf pour dire que dégradations écologiques et misère sociale sont les deux produits d’un même système (et de la misère culturelle qui est la sienne). De plus, misère sociale et misère écologique sont intimement liées : d’une part les populations les plus démunies sont les plus exposées aux pollutions et nuisances de toutes sortes, d’autre part, les peuples ayant gardé un mode de vie traditionnel en étroite symbiose avec la nature sont les plus menacés par l’altération de l’environnement (c’est ainsi que des pauvres deviennent des miséreux…).

Le système générant cette triple misère est tout simplement le système capitaliste qui aujourd’hui s’emballe pour devenir « hyper-capitaliste » (Paul Ariès) en exerçant sa prédation marchande sur les derniers espaces de gratuité. Or le mot « développement durable » n’attaque pas les fondements du système capitaliste, ce que fait en revanche le mot « décroissance ».

La décroissance contre le développement durable

Je préfère également le mot « décroissance » parce qu’il est issu d’une réflexion économique globale, initiée par l’économiste Nicholas Georgescu-Roegen, qui avait bien compris que l’économie n’est pas un système fonctionnant en vase clos mais qu’elle s’insère dans un vaste système biologique/chimique/physique et que de ce fait, elle est soumise à l’une des lois fondamentales de la physique : la loi de l’entropie (cf supra) (9). Le même Nicholas Georgescu-Roegen a d’ailleurs écrit, en 1991 : « Il n’y a pas de doute que le développement durable est l’un des concepts les plus nuisibles ». Enfin, je préfère le terme de décroissance car il dépasse la simple réflexion d’ordre scientifique portant sur les lois de l’économie et la crise écologique : la décroissance comporte une dimension philosophique importante, défendant de nouvelles valeurs face à une civilisation qui ne se donne plus de limites et refuse de devenir adulte (Paul Ariès).

La révolution écologique nécessite une révolution mentale…et un peu de courage.


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